INTERVIEW CLFT MILITIA

CLFT Militia, déjà le nom, ça vient d’où ?

Simon : Croix Rousse – Lyon – France – Terre ? Club des Linguistes Fans de Techno ? Non. En fait, CLFT consonne avec Colifata, une radio-emission, depuis l'asile de Buenos Aires, en Argentine. Il y a pour moi un lien certain entre folie et musique techno. Mad Mike, « The Illuminator », par exemple. Ou... « Psychiatric hospital », de Reeko, sur Mental Disorder. Je crois que c'est Audiard qui un jour a dit : heureux soient les félés, car ils laisseront passer la lumière des stroboscopes.

Pouvez vous nous faire un petit rappel de l’histoire de ce collectif  et vos ‘’activités’’ ?

Simon : Au départ, nous étions webzine. J'écrivais avec Lucas (Aujourd'hui chez Lyl Radio) des chroniques de disques à côté de la plaque... Ensuite, on a créé la chaine de podcast, puis commencé à organiser des soirées. De là, nous avons rencontré plusieurs artistes, émergents, et décidé de monter le label. On achetait beaucoup de disques, aussi, alors on a commencé à faire les warm-up de nos événements, puis, petit à petit, on nous a invité ailleurs, alors on est devenu deejay, plus ou moins malgré nous.

D’ailleurs je dis collectif, mais est ce vraiment un collectif ou plutôt le truc de Simon ?

Simon : CLFT ne m'appartient pas plus que Facebook n'appartient à Zuckerberg. Lui se partage le magot avec ses actionnaires, ici, je ne prends jamais de décisions sans prendre l'avis des activistes qui m'entourent. J'en ai été l'instigateur, j'ai certe lancé l'idée, mais le projet ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui sans l'aide précieuse de mes différents collaborateurs.

Iker : Moi qui n'ai pas eu la chance de voir le projet se créer, mais je considère tout de même CLFT comme une entité multicéphale. Chacun ici possède sa propre personnalité, et s'investit de manière différente, mais ce qui importe vraiment c'est la complémentarité que nous nous apportons ensemble. C'est ça, qui fait notre force. On le remarque quand nous jouons. Parfois c'est moi, parfois c'est Simon, parfois c'est nous deux, avant c'était Alex, Romain, Etienne, et demain peut-être quelqu'un d'autre.

Votre truc, c’est la techno. Oui mais laquelle ? c’est quand même un genre musical qui va bientôt fêter ses trente balais…

Simon : Notre truc, c'est la Techno, oui, mais avec un grand T. En long, en large, et surtout en travers. Celle du début, celle des nineties, celle avec des chants de baleines et des cris de dauphins, celle qui vire au Hardcore, celle qui bascule vers la Trance, celle qui part en Gabber, celle qui s'autorise du groove, celle qui vient du Ghetto, celle qui se la raconte intello, celle d'aujourd'hui aussi, et même celle de demain...

Iker : Au risque de faire figure d'ancien, je dirai que pour ma part, je reste dans le côté plus sombre, plus industriel, plus métallique de la techno, avec un certain respect pour les précurseurs du genre, l'EBM, la new wave, l'italo, la disco.. Celui qui ne considère pas la disco, il ne peut pas prétendre vénérer la techno.

C’est quoi vos influences?

Simon : Frank Tovey, Robert Görl, Jacques Lacan, Jay Denham, Emmanuel Top, Ron Maney, Gene Hughes, Robert Leiner, Peter Kuhlmann, Marc Trauner, Jeroen Schrijvershof, Cisco Ferreira, Robert Henke, jean Rouch, Heiko Laux, Rob Alcock & Tommy Gillard, Max Duley, Marco Passarani...

Iker : Fear Factory, Ministry, Nine Inch Nails, Robotnick, Moroder, Rammstein, Einsturzende Neubaten, Nitzer Ebb, Suicide. Mulero, Surgeon, Regis, Female, Kyuss, Tool, et puis Jeff Mills.  

Là vous allez jouer sur la scène du Club Transbo . C’est quoi votre cercle d’amis locaux, les groupes, assos avec lesquels vous vous sentez des points communs?

Simon : Ils sont nombreux... Groovedge, BFDM, Palma, Chez Émile, Macadam Mambo, In Aeternam Vale, Fred Umwelt, Papa, Maman, et bien, sur nos colocataires Lyl Radio, et Mus Joutra.

Iker : Étant moins lyonnais que Simon, et puis... n'en ayant rien à faire des rivalités footbalistiques, j'ajouterai les parisiens Construct-Reform, Positive Education, de Saint-Etienne, et Metaphore, de Marseille. Chez eux, c'est un peu comme à la maison.

Premier disque acheté ?
Simon : Dopplereffekt – Gesamtkunstwerk. La base, le point de départ, et de non-retour.
Iker : Jean-Michel Jarre – Hong Kong, en 1994. Moquez-vous, vous pouvez.

Premier groupe ou artiste qui t’a donné envie de faire ça?
Simon : Underground Restistance, Jeff Mills, Carl Craig, Hood, Atkins, et The Unknown Writer. « Find your strength in the sound and make your transition. » J'ai appliqué le manifeste à la lettre.
Iker : Pour moi, ce n'est pas une personne en particulier, pas un artiste en particulier, mais surtout les amis qui m'entouraient à l'époque où je vivais à Valencia, en Espagne ; Dj Citric, Dj Phone de Subsist, Alberto Vidal, etc...

Dernier groupe ou artiste sur lequel tu as craqué ?
Simon : Leo Anibaldi, et son album Cannibald. 1992. « Il futuro è nostro ! »
Iker : Plutôt un label, pour le coup : Aufnahme + Wiedergabe. « Enregistrer et reproduire », en français. J'avais trouvé la deuxième référence chez Hardwax, et je suis tombé amoureux. Je pensais que c'était tout neuf, en fait ils ont sortis presque 80 disques, dans des styles bien variés, de l'EBM à la Dark Wave. Bref, tout ce que j'adore.

Premier concert auquel tu as assisté ?
Simon : Earth, Wind and Fire, dans l'amphitéatre de Vienne, en 1997, par là. Je devais avoir huit ans, je n'oublierai jamais. Il pleuvait des trombes d'eau, mais pas sur eux. Un rideau de pluie s'était formé juste derrière la scène. Les mecs sont bénis par les dieux. C'est surement pour ça qu'eux seuls ont le droit de porter des costards plaqués or.
Iker : Je devais aussi avoir 8 ans, periode post-franquiste, en Espagne. Le groupe s'appelait Siniestro Total Du punk. Je ne connaissais pas. Je me rappelle que la musique et l'ambience était assez détendue, mais surtout que les gars portaient des t-shirts avec ce slogan : « Por el bien de todos, callese señora ».

Dernier concert auquel tu as assisté ?
Simon : C'est justement le problème. Dernièrement, tous les concerts où j'ai mis les pieds, je n'ai vraiment fait qu'y assister. Un concert, ça doit se vivre, s'éprouver. Je donnerai donc ici le dernier m'ayant investit : N1L, au local Sumo, mon domicile partagé, un dimanche soir de rentrée. J'ai du quitter la salle au bout de 20 minutes, tellement c'était intense.
Iker : Tyler The Creator, en Pologne à Katowice. C'était dans le cadre d'un festival, Tauron Nowa Muzyka. La prog s'étendait de l'experimentale au gabber. Pratiquement que des sets live, dans un espace idyllique. Une ancienne mine, devenue un espace culturel, avec une architecture futuriste. Hautement recommandé!

Première fois avec Clft ?
Simon : Pour notre soirée de lancement, au DV1. On avait du à peine atteindre les 100 entrées. Je pense que le public était composé à 80% de potes, qu'on avait mis sur la liste.
Iker : J'ai découvert le collectif lors en 2013, lors d'une soirée au DV1, en tant que public. J'avais vu des affiches dans la rue, mentionnant « oldschool warehouse party »... Direct! Simon jouait avec MPIA3, c'était dans le cadre du Mirage Festival. Je le connaissais de vu, il travaillait au Café de la Mairie (RIP). Alors le jour d'aprés, je suis allé lui filer une demo et quelques semaines plus tard je jouais au Platinium (RIP) pour le off des Nuits Sonores. On avait invité Gwen, Isolated Lines, qui depuis, est devenu un bon ami.

Dernière date avec Clft ?
Simon & Iker  : Au Batofar, à Paris.

Dernière promo ou actualité à faire sur Clft ?
Simon : Notre dixième disque, qui ne devrait plus tarder. 4 titres de notre ami Binny, de Liverpool, que nous avions d'ailleurs invité au Transbo pour notre première.

Première émotion amoureuse ?
Simon : Une tortue. Elle s'appelait Pétronille. Je devais avoir 4 ans quand elle a décidé de mettre fin à ses jours. Depuis je n'ai jamais pu aimer qui que ce soit d'autre, la race humaine est bien trop cruelle.
Iker : Et moi, je n'ai jamais eu d'animal domestique.

Première émotion esthétique ?
Simon : Petronille, et ses 120 petits, cette fois. Claude Ponti. À la fin du bouquin, il faisait une grosse teuf tous ensemble. Une sorte de Rave pour enfant.
Iker : Les vagues, la mer, et leur côté infini, hypnotique. C'est toujours la même chose, mais jamais vraiment pareil. Une sorte de fausse boucle, comme l'oscillateur d'un synthé. Comme la techno, en fait.

Premier souvenir?
Simon :
Je crois que j'ai oublié. Se souvenir du futur, c'est bien plus important.
Iker : Des choses qu'ont m'a raconté, mais en réalité j'étais bien trop jeune pour pouvoir m'en souvenir réellement. Alors je ne sais pas.

Première fois au Transbordeur?
Simon : Dopplereffekt toujours, en 2012. C'était plutôt Arpanet, à vrai dire. Il y avait pas grand monde, moins qu'à nos propre soirées. Je crois que c'est la seule fois de ma vie où je me suis retrouvé à faire la groupie. Je m'étais incrusté dans les backstages, en scred. Je suis reparti avec un autographe, qui trone toujours au dessus de mon bureau.
Iker : Riddim Collision, 2011. Je venais juste de m'installer à Lyon. Je me souviens être arrivé très tôt, pour voir Ed Chamberlain. Je n'ai pas regretté ; Il avait fait un live chanmé, et à grand coup de souris. La fouille, à l'entrée, était sévère... Ça m'avait énervé, un peu. Mais sans rancune, hein, aucune!